Comment l’intelligence artificielle transforme-t-elle les possibilités de personnalisation de la communication client ?

L’IA générative apporte deux transformations majeures. La première concerne les services clients : plutôt que d’utiliser une réponse type, l’IA va générer des contenus personnalisés, adapté au contexte de l’émetteur. Concrètement, par exemple, quand différentes banques répondent à la même question, elles ne le font pas de la même façon. Chaque établissement a ses méthodes, sa façon de répondre à ses clients. L’IA permet d’intégrer ces caractéristiques dans sa communication. Elle ajuste le contenu, intègre l’identité de marque, ou encore, les codes de communication spécifiques à chaque entreprise. Cela signifie adapter le vocabulaire, le ton, la structure des phrases, mais aussi les références réglementaires ou les procédures internes propres à chaque organisation. Cette contextualisation représente un enjeu stratégique : c’est notre métier de demain, être capable de configurer l’IA pour que les communications vers les clients finaux portent les valeurs de la marque et répondent aux attentes spécifiques de chaque client.

Le second axe de transformation concerne la migration de systèmes documentaires. Nous avons développé une solution qui permet de transférer des documents d’un système à un autre avec l’IA. L’intelligence artificielle identifie automatiquement les différents blocs de contenu – adresses, éléments de contact, variables personnalisables – puis les transpose dans le nouveau format en respectant les éventuelles évolutions de la charte graphique et d’interlocution. Enfin, elle automatise la conception des modèles dans le système cible. Cela améliore considérablement la fiabilité des migrations et permet de prendre en compte les évolutions de la charte de communication, mais surtout, cela diminue considérablement les coûts et délais de migration !

Comment ces évolutions se traduisent-elles au quotidien ?

L’impact le plus important aujourd’hui concerne la saisie de données. Une partie de notre activité consiste à récupérer des données contenues dans des documents non structurés – courriers, formulaires, réclamations – pour les intégrer dans des systèmes d’information structurés. Ce travail minutieux de ressaisie est désormais largement automatisé par l’IA. Cette évolution transforme fondamentalement notre chaîne de valeur : les collaborateurs peuvent se concentrer sur des tâches de contrôle et de validation plutôt que sur la saisie pure.

L’automatisation s’étend également à la modernisation des communications. Les entreprises peuvent transformer massivement leurs documents grâce à l’IA : passage d’une police Arial 12 vers une Calibri 14, adaptation des couleurs, mise à jour des chartes graphiques… Ces transformations, qui nécessitaient auparavant des interventions manuelles sur chaque modèle, deviennent automatiques. Cela permet aux entreprises de moderniser rapidement l’ensemble de leurs communications sans mobiliser des équipes pendant des mois, tout en garantissant une cohérence parfaite sur l’ensemble du parc documentaire.

Comment l’IA permet-elle de passer d’une personnalisation réactive à prédictive ?

Tout d’abord, il faut lever une confusion qui existe sur le terme « IA ». L’aspect prédictif ne relève pas de l’intelligence artificielle à proprement parler, mais de l’analyse statistique des données. L’IA traite et reconnaît, quand les statistiques, elles, peuvent prédire des comportements. J’aime dire qu’une IA prédictive, c’est de l’IA augmentée de statistiques.

Pour y arriver, il faut avoir un volume important de données et identifier les cas exceptionnels dans les milliers de communications traitées. Ces cas exceptionnels sont rares mais ce sont eux qui sont intéressants, par exemple, une résiliation, une recommandation négative ou une escalade juridique. L’objectif est de pouvoir identifier ces cas exceptionnels et leurs expressions pour pouvoir repérer les mêmes signaux faibles dans d’autres parcours clients. Cela permet d’anticiper les besoins, les risques de départ ou les opportunités commerciales avant même que le client ne les exprime explicitement. On peut donc adapter la communication en conséquence, de manière préventive.

Comment concilier l’utilisation croissante de l’IA et le besoin d’authenticité humaine ?

D’abord, la pertinence n’est pas absolue. L’IA peut parfois dériver ou commettre des erreurs sans s’en rendre compte. Contrairement aux systèmes algorithmiques classiques qui sont capables de s’auto-noter – un logiciel de reconnaissance optique vous dira par exemple qu’il y a 95% de chances que sa lecture soit correcte – l’IA est incapable de faire cela. Elle ne peut pas évaluer la justesse de sa propre réponse. Dans un contexte industriel où nous traitons des millions de communications, il faut impérativement pouvoir identifier celles qui sont fiables et celles qui présentent un risque. D’où la nécessité d’un contrôle humain.

Ensuite, il y a une réticence culturelle manifeste. Les Français, en général, estiment que l’IA appauvrit la relation client : ils ne sont pas du tout prêts, par exemple, à être contacté par téléphone par une IA !

Je prône une approche équilibrée : pour moi, l’IA reste un outil, une assistance. L’IA ne va pas remplacer l’humain, elle va nous permettre d’être plus qualitatifs, plus efficaces. L’objectif n’est pas de supprimer le contact humain, mais de le rendre plus pertinent en libérant les conseillers des tâches répétitives pour qu’ils se concentrent sur les situations plus complexes ou qui nécessitent davantage de qualités relationnelles.

Quelle vision pour 2030 et au-delà ?

Appuyons-nous sur l’analogie des échecs pour projeter l’évolution. Quand Kasparov a perdu son match contre l’IA en 1997, c’était la première fois qu’une machine battait le champion du monde. À l’époque, le meilleur joueur atteignait 2 500 points au classement international. Aujourd’hui, les champions dépassent les 2 700 points. Autrement dit, l’IA n’a pas tué les échecs : elle a permis aux humains de progresser d’environ 10 % en leur donnant de nouveaux outils d’analyse et d’entraînement. L’IA nous permettra, je le crois, de progresser tous vers une meilleure qualité.

Mais cette évolution s’accompagne de défis majeurs, dans le monde du travail notamment. Il va falloir que les gens acceptent de changer et qu’ils en soient capables. Je ne crois pas que le nombre d’emplois va diminuer, ce sont surtout les postes qui vont changer, les tâches, vers des missions à plus forte valeur ajoutée.

Enfin, l’enjeu environnemental constitue une préoccupation croissante, incontournable. Il y a 5 ans, l’informatique représentait environ 4 % de la consommation mondiale d’énergie primaire. Cette part va continuer d’augmenter de manière exponentielle à cause de l’IA pour atteindre 10 % environ à horizon 2030. Nous n’aurons pas le choix que d’intégrer la dimension durable aux applications futures de l’IA.

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