Étape 1 : Adapter la documentation pour la rendre « IA-compatible »
Avant même de déployer un agent IA, la première étape consiste à retravailler les procédures existantes. « Nos consignes contenaient beaucoup de schémas et de tableaux, visuellement simples pour un humain, mais difficilement compréhensibles pour une IA », explique FrédéricBailly. La solution : transformer ces éléments visuels en texte littéral, plus structuré et explicite.
Cette phase de « rédaction IA », bien que fastidieuse, s’avère déterminante. Elle dure environ trois jours par processus. Objectif : produire une documentation qui contient les référentiels de procédures clients, évite les hallucinations de l’IA et garantit des réponses pertinentes.
Étape 2 : Tester avec des experts avant le déploiement
Une fois la documentation retravaillée, place aux tests avec des collaborateurs expérimentés : « Ils posent des questions dont ils connaissent déjà la réponse, pour valider que le bot répond correctement », précise le directeur de la performance industrielle.
Cette étape permet également d’affiner la qualité des prompts – ces formulations qui conditionnent la pertinence des réponses de l’IA. Les experts identifient les bonnes pratiques de questionnement, qui seront ensuite transmises aux nouveaux collaborateurs. Résultat : un référentiel de prompts contextualisés, adapté aux spécificités métiers, qui permet d’obtenir des réponses fiables dès les premiers jours d’utilisation.
Étape 3 : Former et communiquer auprès des équipes
Le déploiement technique d’un agent IA reste relativement simple : inscription des collaborateurs sur une plateforme, accès à un chatbot intégré à leur environnement de travail. Mais la réussite repose surtout sur l’accompagnement humain. « Au-delà de l’acculturation générale à l’IA, nous avons formé nos collaborateurs à la manière de rédiger un prompt efficace », souligne Frédéric Bailly.
La communication joue également un rôle clé dans la gestion du changement. « C’est important d’expliquer aux équipes ce qui sera mesuré, comment et pourquoi », résume le responsable.
Étape 4 : Mesurer l’impact
Pour évaluer l’efficacité de l’agent augmenté, Tessi a opté pour l’approche comparative : scinder les nouvelles équipes en deux panels, l’un avec IA, l’autre sans. Les résultats sont éloquents. Dès la deuxième semaine de formation, les collaborateurs équipés de l’IA affichent une productivité supérieure de 25 à 30 % par rapport au panel témoin, tout en respectant les niveaux de qualité attendus par les clients. Autre bénéfice majeur : la libération du superviseur-formateur, qui n’est plus sur-sollicité. « Au final, sur une équipe de sept personnes, on gagne l’équivalent d’un ETP pendant deux semaines », chiffre Frédéric Bailly.
Étape 5 : Savoir retirer l’outil au bon moment
L’agent augmenté n’a pas vocation à rester un assistant permanent. À partir de la fin de la troisième ou du début de la quatrième semaine, un effet de plateau apparaît. Les collaborateurs, trop dépendants du bot, ralentissent leur cadence. « Le réflexe de consulter l’IA devient contre-productif : ils perdent du temps à interroger le bot alors qu’ils savent faire », constate Frédéric Bailly.
À ce stade, il devient nécessaire de retirer l’outil du quotidien. Les collaborateurs ont acquis les fondamentaux ; continuer à utiliser systématiquement l’IA les freine plus qu’elle ne les aide. L’enjeu consiste alors à repositionner le bot comme un assistant ponctuel, mobilisé uniquement pour les cas complexes ou les rappels de règles spécifiques.
Les erreurs à éviter
Le principal écueil réside dans la qualité de la documentation source. Sans une refonte approfondie des procédures pour les rendre intelligibles par l’IA, les hallucinations et les erreurs compromettent rapidement la confiance des utilisateurs.
Autre piège : la tentation de surestimer les capacités de l’IA. « On a d’abord cru qu’on allait révolutionner les processus en claquant des doigts, sans effort », reconnaît l’expert. La réalité impose un travail préparatoire conséquent, avant de générer des bénéfices sur le long terme.
L’agent augmenté dans le back-office s’impose comme un accélérateur efficace de la montée en compétence, à condition d’être déployé méthodiquement et utilisé de manière raisonnée. Au-delà de la formation, l’IA ouvre d’autres perspectives pour transformer les processus métiers. « L’IA va automatiser les actes simples », prédit Frédéric Bailly. Cette automatisation des tâches répétitives et à faible valeur ajoutée permettra de réorienter les collaborateurs vers des activités plus complexes, nécessitant davantage de réflexion et d’expertise.