La fraude documentaire, un fléau banalisé

Retoucher son bulletin de salaire pour obtenir un crédit ou un logement social, modifier une facture pour bénéficier d’une subvention… Ces pratiques, jadis marginales, sont aujourd’hui banalisées. « La fraude documentaire n’est plus l’apanage des réseaux criminels, constate Jean-Christian Valette, Directeur Marketing Fraudes & KYC chez Tessi. Nous assistons à l’émergence d’une sorte de nouvelle « friendly fraud » : Monsieur tout-le-monde qui bidouille ses documents, considérant que ce n’est pas bien grave. »

Les chiffres confirment cette démocratisation inquiétante. D’après l’étude IN BANQUE, menée par NEXT CONTENT en partenariat avec Capgemini Invent et Tessi en 2024, un Français connecté sur 5 reconnait avoir déjà falsifié des documents pour faciliter l’ouverture d’un compte bancaire ou l’obtention d’un crédit, ou dans le cadre d’une recherche de logement ou d’emploi. Ce taux grimpe même au-delà de 20 % chez les moins de 35 ans.

Un arsenal de fraude accessible en quelques clics

Ces dernières années, les techniques de falsification se sont diversifiées, popularisées et grandement améliorées. « La moitié des fraudes documentaires se fait avec un simple logiciel de retouche photo, un outil désormais maîtrisé par un grand nombre de personnes », révèle Jean-Christian Valette. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Un véritable écosystème de la fraude s’est développé. Des sites internet spécialisés proposent des « vrais-faux » documents : « Pour une dizaine d’euros, vous pouvez acheter en ligne un bulletin de salaire parfaitement calibré, avec des taux de cotisation correspondant au code NAF et à la convention collective », détaille l’expert de Tessi. D’autres circuits fournissent des kits complets incluant carte d’identité et justificatifs divers. Des tutoriels circulent même sur les réseaux sociaux, expliquant pas à pas comment créer des faux documents. Autant de techniques qui ont considérablement amélioré la qualité des faux, rendant leur détection plus complexe.

L’arrivée de l’IA générative bouleverse encore davantage la donne. Le 2025 Identity Fraud Report révèle ainsi une explosion des manipulations de documents numériques, en hausse de 244% entre 2023 et 2024. « Les sites utilisant l’IA peuvent désormais générer des faux documents d’identité à la demande : vous uploadez une photo, choisissez la nationalité souhaitée et en quelques minutes, vous obtenez une contrefaçon très réaliste », s’inquiète Jean-Christian Valette.

L’étude IN BANQUE dresse ainsi un panorama édifiant de ces pratiques : 47% des fraudeurs utilisent des logiciels de retouche d’image, 42% des sites spécialisés et 39% recourent déjà à l’IA générative.

Des secteurs particulièrement vulnérables

Certains secteurs d’activité sont particulièrement visés par les fraudeurs. « La banque et l’assurance arrivent en tête des secteurs les plus touchés, suivis des services publics et de l’aide sociale, puis de l’immobilier », analyse Jean-Christian Valette.

Dans le secteur bancaire et assurantiel, la fraude documentaire vise principalement l’obtention de crédits ou d’indemnisations. Par exemple, les fraudeurs majorent artificiellement leurs revenus sur leurs bulletins de salaire pour accéder à des prêts au-delà de leur capacité réelle de remboursement.

Les services publics et l’aide sociale font face à un autre type de manipulation : la minoration des revenus. « Dans l’habitat social par exemple, les candidats à un logement HLM vont cette fois diminuer leur salaire sur leurs justificatifs pour entrer dans les critères d’attribution », explique Jean-Christian Valette. Un phénomène qui prend une ampleur préoccupante, au point que les bailleurs sociaux et les départements gestionnaires du RSA commencent à déployer des outils de détection systématique.

L’immobilier locatif privé n’est pas épargné. « Dans ce secteur, 20 à 30 % des dossiers de location contiennent des documents falsifiés », souligne l’expert. Les agences immobilières, jusqu’ici peu outillées face à ce risque, cherchent désormais à sécuriser leurs processus de vérification des dossiers.

Des conséquences majeures pour les entreprises et la société

La fraude documentaire génère des impacts considérables, en premier lieu financiers. « L’objectif est quasi systématiquement d’obtenir un avantage indu », résume Jean-Christian Valette. Les pertes se chiffrent par millions pour les banques et assurances, affectant directement leurs résultats et leur capacité à maintenir des services compétitifs.

L’impact se mesure aussi à l’échelle de la société et des comptes publics. « La fraude sociale se chiffre en milliards d’euros, une perte qui affecte directement les contribuables dans un contexte de déficit budgétaire préoccupant », souligne l’expert de Tessi.

Au-delà des pertes financières directes et indirectes, la fraude documentaire expose les entreprises à des risques majeurs de non-conformité, en particulier concernant les obligations de Lutte Contre le Blanchiment et le Financement du Terrorisme (LCB-FT) et de connaissance client (KYC).

Enfin, l’impact réputationnel ne doit pas être négligé. « Une banque épinglée pour des défaillances dans la vérification des documents voit son nom dans les gros titres de la presse. C’est désastreux en termes d’image », rappelle le directeur Marketing Fraudes & KYC.

Tessi SMARTCONTROL : la solution contre la fraude documentaire

Face à l’industrialisation de la fraude documentaire, les solutions technologiques deviennent incontournables. Tessi SMARTCONTROL illustre cette nouvelle génération d’outils capables d’analyser la validité des documents.

La solution combine plusieurs procédés pour sécuriser les processus de vérification. L’extraction intelligente récupère et analyse automatiquement les informations comme les noms, dates ou montants. Tessi SMARTCONTROL détecte aussi les modifications suspectes, qu’il s’agisse de retouches via un logiciel, de falsifications de PDF ou de faux documents générés en ligne. La solution intègre également une dimension d’authentification. « Notre technologie peut comparer automatiquement les données avec des bases officielles via des protocoles comme le 2D-DOC ou la blockchain », détaille Jean-Christian Valette.

Tessi SMARTCONTROL peut également accéder directement aux informations à leur source. « Le meilleur moyen de contrôler un document, c’est de ne pas avoir à le contrôler », explique le directeur Marketing Fraudes & KYC. Cette approche empêche la fraude, dès l’origine, puisqu’elle obtient les données directement auprès des émetteurs (administration fiscale, fournisseurs d’énergie, Sécurité sociale, etc.).

« C’est une course sans fin, souligne l’expert. Les fraudeurs améliorent constamment leurs techniques pour dissimuler les falsifications, et notre moteur doit apprendre en permanence à les reconnaître. »

Une solution flexible et adaptative

Tessi SMARTCONTROL propose une approche sur-mesure. « Notre solution permet d’ajuster le niveau de vigilance : en fonction du type de document ou du moment dans le parcours client », explique Jean-Christian Valette. Cette modularité permet de préserver l’expérience utilisateur en évitant des blocages inutiles tout en garantissant une sécurité maximale sur les documents sensibles.

La flexibilité s’étend aussi à l’intégration technique. Les grandes entreprises peuvent connecter la solution à leurs systèmes d’information via une API, tandis que les plus petites structures opteront pour une solution plus légère (iframe), intégrée directement à leur site web. « Cela permet de répondre à la démocratisation de la demande, note le directeur Marketing Fraudes & KYC. Avec l’iframe, par exemple, les agences immobilières pourront sécuriser la réception des dossiers de location directement via leur site. »

Le contrôle documentaire, une nécessité durable

Avec le portefeuille d’identité numérique européen (EUDI Wallet) notamment, l’avenir tend vers une dématérialisation toujours plus grande… mais certainement pas totale. En effet, son usage ne sera pas obligatoire en Europe, certaines personnes choisiront donc de conserver les fonctionnements actuels. D’autre part, les fraudeurs privilégieront toujours les canaux les plus vulnérables. « Même dans un monde idéal où l’accès direct aux données serait généralisé, il existera toujours des failles que les fraudeurs exploiteront », analyse Jean-Christian Valette. Surtout, les entreprises doivent gérer des dossiers complets et non des documents isolés. « Il ne s’agit pas uniquement de vérifier l’authenticité de chaque pièce, mais aussi la cohérence entre toutes les informations fournies », conclut le directeur Tessi.

Ainsi, même avec l’avènement programmé des portefeuilles européens d’identité, le contrôle documentaire restera un enjeu majeur. Dans le contexte actuel, mouvant, seule une approche globale et évolutive permettra aux entreprises de garder une longueur d’avance sur les fraudeurs.

Protégez-vous contre la fraude documentaire !