Selon vous, quelles sont les principales étapes pour déployer la facture électronique ?
Tout d’abord, il est crucial de comprendre que cette réforme dépasse le cadre purement comptable. Elle s’inscrit dans une transformation globale des flux opérationnels et, à ce titre, concerne toute l’entreprise et les acteurs de gestion : commande, validation des factures fournisseurs, facturation clients, relation clients…
Pour réussir, il faut donc d’abord effectuer un cadrage rigoureux. Cela passe par une introspection des pratiques de facturation et une cartographie des systèmes en place afin d’identifier les points forts et les faiblesses de la chaîne de traitement. Une démarche qui implique de mobiliser de nombreux acteurs métiers : tous les départements concernés, du commercial au juridique, en passant par le marketing, doivent être informés et préparés.
Une fois ce travail d’analyse effectué, il est crucial d’intégrer les meilleures pratiques observées dans le secteur et de rester attentif aux évolutions du marché. Par exemple, les fonctions et services offerts par les plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) peuvent évoluer ou se concrétiser, le pricing model peut changer. Dans cette perspective, on suivra également avec attention les travaux menés par des organismes comme l’AFNOR, la DGFIP, ou encore le Forum National de la Facture Électronique et des Marchés Publics (FNFE-MPE).
Enfin, le projet doit être planifié et communiqué sous une forme claire, qu’il s’agisse d’une approche minimaliste pour respecter les obligations à court terme ou d’une démarche plus ambitieuse, en profitant de cette opportunité de la facture électronique pour s’engager dans une transformation digitale plus profonde. Cette réforme offre en effet une opportunité unique d’aller au-delà de la simple mise en conformité et de s’engager dans une véritable transformation digitale, incluant par exemple, l’optimisation de la fonction achat et des flux, l’organisation plus centralisée de l’administration des ventes, une approche data et digitale sur les objets de gestion, etc.
Pourquoi les référentiels de données sont-ils au cœur de cette démarche ?
Les référentiels de données, qui regroupent des informations sur les clients, les fournisseurs et les tiers, jouent un rôle clé dans le succès de cette réforme. Avec l’entrée en jeu des plateformes de dématérialisation partenaires (PDP), les données échangées devront répondre à des normes de qualité et d’identification strictes.
Aujourd’hui, il est fréquent – même si peu impactant pour les relations business, sauf en cas de contrôle de TVA – de trouver des erreurs ou des approximations dans les factures, notamment sur informations de SIRET, SIREN ou numéros de TVA intracommunautaires. Or, ces imprécisions, qui pouvaient être tolérées par le passé, entraîneront demain des rejets ou refus systématiques de factures. Ce qui est en jeu, c’est la capacité à maintenir des bases de données précises et à jour. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 30 à 50 % des référentiels actuels sont incomplets ou mal identifiés, d’autant plus lorsqu’il s’agit de clients internationaux, ce qui montre l’ampleur du défi à relever.
Quels sont les risques en cas de référentiels défaillants ?
Les impacts d’une mauvaise gestion des référentiels peuvent être significatifs et toucher plusieurs dimensions de l’entreprise. Un premier risque concerne les rejets, refus ou retraitements de factures, qui pourraient passer de 7 à 15 % aujourd’hui à plus de 30 % avec la réforme. Cela a pour conséquence d’engendrer un surcroît de travail pour corriger ces erreurs, mais surtout des retards dans les paiements. Ces délais affectent directement la trésorerie des entreprises, limitant leur capacité d’investissement et réduisant leurs marges de manœuvre financières.
Un autre risque, souvent sous-estimé, concerne les relations avec les clients et les fournisseurs. En effet, une mauvaise qualité des processus de facturation et de paiement entraîne une dégradation de la confiance et de la collaboration, et au final, nuit à la crédibilité et à la compétitivité de l’entreprise sur le long terme.
Quelles solutions peuvent aider les entreprises à relever ce défi ?
Il est indispensable de s’entourer de partenaires compétents pouvant couvrir plusieurs axes et impacts de la réforme, de l’état des lieux à l’élaboration d’un plan projet structuré et défendable au niveau COMEX, en passant par les chemins de mise en conformité… Cela inclut une réflexion sur la gouvernance des données et l’organisation interne.
Cependant, il faut aussi penser à la mise en qualité continue des données. C’est là que peuvent intervenir des acteurs comme Tessi, avec des services spécialisés pour enrichir les référentiels. Cette complémentarité permet aux entreprises de bénéficier d’un accompagnement complet sur l’ensemble de la chaîne de facturation.
Peut-on aller au-delà de la conformité et valoriser les données issues de ces référentiels ?
Absolument. La structuration des référentiels imposée par la réforme ouvre des perspectives intéressantes pour les entreprises. Une fois les données fiabilisées, elles peuvent être utilisées comme un levier stratégique. Par exemple, elles permettent de produire des tableaux de bord détaillés, d’automatiser des processus complexes ou encore de détecter des anomalies grâce à des algorithmes d’intelligence artificielle. La réforme de la facture électronique ne doit donc pas être perçue seulement comme une contrainte, avec ses nouvelles exigences en termes de référentiels, mais aussi comme une belle opportunité de renforcer sa performance opérationnelle par la digitalisation !